Leçons de Van Gogh
Collaboration entre pairs
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Paris, fin 1887
Guillaumin a des idées plus saines que les autres, et je crois qu'en tant qu'homme, il a de meilleures idées que les autres. Si nous incarnions tous ses qualités, nous produirions plus de bonnes choses et aurions moins de temps et d'envie d'être à la gorge les uns des autres ou de nous livrer à des conflits futiles.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Paris, fin 1887
… Je crois que la première condition du succès est de mettre de côté les petites jalousies ; seule l'unité peut donner la force. Cela vaut bien de sacrifier l'égoïsme au profit de l'intérêt commun.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, mars 1888
Peut-être y aurait-il un réel avantage pour de nombreux artistes amoureux du soleil et de la couleur à émigrer vers le sud.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, juin 1888 (première lettre)
En effet, c'est une grande raison de regretter l'absence d'une loyauté partagée entre les artistes, qui sans cesse se critiquent et se persécutent, mais heureusement, ils échouent à s'annuler.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, juin 1888 (quatrième lettre)
Ah, si plusieurs peintres acceptaient de collaborer à de grandes choses. L'art du futur pourra peut-être nous en montrer des exemples. Le truc, c'est que pour les tableaux dont on a besoin maintenant, il faudrait être plusieurs pour faire face aux difficultés matérielles. Eh bien - hélas - nous n'en sommes pas là - l'art de la peinture n'avance pas aussi vite que la littérature.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, juillet 1888 (deuxième lettre)
Mon cher vieux Bernard, par collaboration, je ne voulais pas dire qu'à mon avis deux peintres ou plus devaient travailler sur les mêmes tableaux. J'ai plutôt voulu entendre par là des œuvres divergentes, mais qui se tiennent ensemble et se complètent. Voyons les primitifs italiens et les primitifs allemands et l'école hollandaise et les Italiens proprement dits, enfin, voyons toute la peinture.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, juillet 1888 (deuxième lettre)
​Ensuite, il y a le fait que les difficultés matérielles de la vie du peintre rendent désirable la collaboration, l'union des peintres... En sauvant leur vie matérielle, en s'aimant comme des amis au lieu de se prendre à la gorge, les peintres seraient plus heureux et en en tout cas moins ridicule, moins sotte et moins coupable. Cependant, je n'insiste pas, sachant que la vie nous prend si vite que nous n'avons pas le temps de discuter et d'agir en même temps. Donc, actuellement, l'union [des peintres] n'existe que très incomplètement, nous naviguons en haute mer dans nos petits et méchants bateaux isolés sur les grandes vagues de notre temps.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, septembre 1888 (deuxième lettre)
… J'ose vraiment croire que ceux qui aiment le travail artistique verront leurs capacités productives se développer dans le sud, mais attention à votre sang, et méfiez-vous de tout le reste.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, octobre 1888 (première lettre)
L'idée de créer une sorte de franc-maçonnerie de peintres ne me plaît pas énormément. Je méprise profondément les réglementations, les institutions, etc. Bref, je cherche autre chose que des dogmes qui, loin de régler les choses, ne provoquent que des disputes sans fin. C'est un signe de décadence. Cependant, une union de peintres n'existe encore qu'à l'état d'esquisse vague mais très large, alors laissons tranquillement ce qui doit arriver, arriver. Il sera plus beau s'il cristallise naturellement ; plus on en parle, moins ça arrive.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, octobre 1888 (première lettre)
... il vaut mieux de part et d'autre essayer d'échanger de bonnes choses que de les faire trop hâtivement. Parfois, il vaut mieux que les deux parties cherchent à échanger de bonnes choses plutôt que de les faire trop hâtivement.
Lettre de Vincent à Émile Bernard
Arles, octobre 1888 (première lettre)
J'ai longtemps été touché par le fait que les artistes japonais ont très souvent pratiqué l'échange entre eux. Cela prouve qu'ils s'aimaient et se tenaient et qu'il y avait une certaine harmonie entre eux et qu'ils vivaient justement dans une sorte de vie fraternelle naturellement et non dans des intrigues. Plus nous leur ressemblerons à cet égard, mieux nous nous en sortirons.