Leçons de Van Gogh
Éthique du travail et diligence

Je persiste à croire que vous vous rendrez compte que dans les ateliers, on n'apprend pas grand-chose sur la peinture, ni qu'on acquiert beaucoup de connaissances sur la vie elle-même.  Au lieu de cela, nous nous retrouvons obligés d'apprendre à vivre, tout comme nous apprenons à peindre, sans compter sur les vieux trucs et les stratagèmes des trompeurs. Ma conviction reste inébranlable non pas parce que je t'ai réprimandé, mais parce que j'espère que cela deviendra ta propre conviction.

Je l'ai peint au milieu du mistral. Mon chevalet était fiché dans le sol avec des piquets de fer, méthode que je vous recommande. Nous enfouissons les pieds du chevalet puis enfonçons un pieu en fer de 50 centimètres de long à côté. Sécurisez le tout avec des cordes et vous pourrez travailler confortablement dans le vent.

Peindre et baiser beaucoup sont très compatibles ; ça affaiblit le cerveau, et c'est sacrément ennuyeux.

Le symbole de saint Luc, patron des peintres, est, comme vous le savez, un bœuf. Par conséquent, nous devons être aussi patients qu'un bœuf si nous souhaitons labourer dans le domaine artistique.

N'est-ce pas l'intensité de la pensée plutôt que le calme du toucher que nous recherchons et un toucher calme et bien réglé est-il toujours possible compte tenu des circonstances de travail impulsif sur place et dans la nature ? Eh bien - il me semble - pas plus que des mouvements d'escrime lors d'une attaque.

C'est juste que c'est fatiguant, ce soleil là.  Je suis aussi complètement incapable de juger mon propre travail. Je ne peux pas voir si les études sont bonnes ou mauvaises. J'ai sept études de blé, malheureusement, toutes contre mon gré, rien que des paysages - des paysages jaune vieil or - faits vite, vite, vite et à la va-vite, comme le moissonneur qui se tait sous le soleil de plomb, concentré sur son travail.

Maintenant, je ne suis pressé de rien. Les projets échouent si souvent et les meilleurs calculs que nous faisons, tout en profitant du hasard et en travaillant au jour le jour sans parti pris, nous font beaucoup d'imprévus.

De plus en plus, je commence à croire que la nourriture a quelque chose à voir avec notre capacité à penser et à faire des peintures ; pour moi, cela ne contribue pas à la réussite de mon travail si mon estomac me gêne.

Mais pour faire du bon travail, il faut bien manger, être bien logé, baiser de temps en temps, fumer sa pipe et boire son café en paix.

Et de toute façon, il n'y a rien de mieux à faire que d'attendre sans s'impatienter, même s'il faut attendre longtemps.

Il m'a longtemps semblé que dans notre sale métier de peintre, nous avions le plus grand besoin de gens aux mains et au ventre d'ouvriers. Des goûts plus naturels – des tempéraments plus amoureux et plus charitables – que les dilettantes parisiennes décadentes et fatiguées.

Mais je dois être patient.

... la vérité est que vous devez travailler dur.

Alors, vos tableaux bibliques sont un échec, mon cher,  mais... il y en a qui font des erreurs comme ça, et même si c'est une erreur, votre retour sera étonnant, et c'est en faisant des erreurs que l'on trouve parfois le chemin.